Les minéraux dynamisés
Une consommation d'engrais qui résiste et un marché qui commence à réagir à l'innovation génèrent un mouvement de réinvestissement dans le métier.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
Le secteur de la fertilisation minérale est en assez bonne santé : la conjoncture est plutôt bonne, les prix sont en baisse depuis deux ans, mais se tiennent à peu près, et les volumes sont relativement stables. Sur la campagne passée, les livraisons d'engrais minéraux ont augmenté de 0,5 % en un an, réparti ainsi : + 3 % en azote, - 5 % en phosphore, - 6 % en potassium. Résultat : « En 2013-2014, nos entreprises ont poursuivi leurs investissements et leurs programmes d'innovation », souligne Gilles Poidevin, de l'Unifa. A ce titre, le mois d'octobre aura été particulièrement riche en inaugurations : une nouvelle unité de granulation chez Timac Agro le 17, un nouveau site de stockage chez Aubrun-Tartarin le 22, et une nouvelle usine d'enrobés pour Haifa France le lendemain. « Les offres innovantes commencent à faire réagir, observe-t-il, et cela se traduit par la création d'un marché innovant à côté du marché traditionnel. »
EuroChem Agro lance cette campagne Utec, une urée à inhibiteur d'uréase, concurrente du Nexen, de Koch fertilizer. De son côté, OCI Agro lance l'engrais à libération contrôlée Exacote, en partenariat avec Ekompany.
Innovations et capacités de production accrues
Quant à Haifa France, elle vient de mettre sur pied sa nouvelle usine de production de fertilisants enrobés à libération contrôlée, sous les marques Coten et Multicote, à Lunel-Viel (Hérault), pour 5 M€ d'investissement. Elle remplace l'atelier « pilote » en place jusqu'alors et qui permettait de produire 6 000 t d'engrais enrobés, soit vendus en l'état, soit composants de formulation pour engrais de mélange. Avec deux lignes en fonctionnement, la production prévisionnelle pour 2014-2015 est de 12 000 t, puis 16 000 t pour 2015-2016. A terme, Haïfa table sur 24 000 t d'enrobés grâce à une troisième ligne de production. « La capacité de production était un facteur limitant de nos ventes alors que la demande mondiale et européenne de ce type d'engrais est en croissance forte », précise André Lefebvre, directeur général d'Haifa France, qui vend aussi d'autres produits importés de sa maison mère.
Quant à Timac Agro France, elle vient de doter son usine historique de production d'engrais compactés du Quai intérieur à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine) d'une nouvelle unité de granulation. Aujourd'hui, elle peut donc allier le compactage à la granulation. « Le process de compactage ne permettait plus à lui seul de répondre pleinement aux critères de qualité demandés par nos clients », note Michel Ara, directeur industriel du pôle malouin, chez Timac Agro, qui revendique cette possibilité unique en Europe de combiner deux process industriels sur le même site.
Du côté du marché de l'azote, l'offre en urée est affectée d'une part par la situation géopolitique en Ukraine, et d'autre part par les unités égyptiennes qui sont à l'arrêt, faute d'approvisionnement en énergie. Les disponibilités étant tendues, on peut s'attendre à une part de marché plus faible de l'urée en France cette année.
Conjoncture favorable
Il est possible, en revanche, que la solution azotée continue de prendre des parts de marché à la faveur d'une capacité américaine à mettre sur le marché un produit fabriqué avec du gaz naturel trois fois moins cher. Si le marché français est de plus en plus perméable, la situation reste un peu particulière cette année. D'une part, les taxes antidumping sur les ammonitrates russes ont été reconduites, ce qui, en passant, n'est pas de nature à réjouir l'Afcome, représentant distributeurs et mélangeurs. Elle n'a pas réussi à convaincre la Commission de l'intérêt de proposer une levée de ces taxes à la fois pour les agriculteurs et les distributeurs, « sur un marché plus ou moins verrouillé par les producteurs européens ». D'autre part, « on est relativement protégé des importations massives d'engrais azotés en provenance des pays tiers grâce à la baisse de l'euro, analyse Christophe Beaunoir, directeur général délégué de Borealis chimie. C'est plutôt une année en notre faveur ». De quoi conforter le programme d'investissement en France de l'autrichien : 125 M€ sur les deux usines de Grand-Quevilly (Seine-Maritime) et Grandpuits (Seine-et-Marne) entre 2013 et 2018 (hors Grand arrêt réglementaire) et 71 M€ à Ottmarsheim (Haut-Rhin) entre 2012 et 2016 (y compris le Grand arrêt). Si Yara France n'avance pas de telles sommes, il ne faut pas oublier qu'elle a récupéré la totalité de l'usine du Havre qu'elle détenait en copropriété avec Borealis. Et le cycle de rachats ne semble pas totalement terminé...
Pour accéder à l'ensembles nos offres :